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La littérature est une chose précieuse…

La littérature est une chose précieuse…

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Hier soir, alors que je lisais la biographie de Victor Hugo par Max Gallo – «Je serai celui-là» –, un message Whats’App de l’abbé Xavier a interrompu ma lecture. Je devrais plutôt dire qu’il a prolongé ma lecture. Car le message en question partageait une lettre du pape François sur le rôle de la littérature dans la formation des prêtres. Je vous laisse imaginer. Lire la plus belle biographie écrite sur le plus grand écrivain français (oui ! oui ! Je me permets de choisir) et s’interrompre pour lire une exhortation du pape François au sujet de la littérature. L’abbé Xavier sait choisir ses moments…

En fait, la lettre du pape ne s’adresse pas seulement aux prêtres. Elle est destinée à chacun d’entre nous.

François, dans la lignée de la grande tradition catholique, n’est pas seulement notre père spirituel. C’est aussi un grand intellectuel. J’ai partagé avec vous ici mes commentaires sur l’encyclique «Laudato Si’» où le pape nous interpelle sur la question de l’urgence climatique. Son propos est juste. Sa pensée claire.

Ses réflexions sur l’importance de la littérature sont tout autant précieuses.

La lecture, commence le pape, «nous ouvre de nouveaux espaces intérieurs qui nous aident à ne pas nous enfermer dans les idées obsessionnelles qui nous tiennent inexorablement».

La lettre de François puise dans de nombreuses sources littéraires. Il cite notamment son compatriote, le grand écrivain argentin Jorge Luis Borges pour qui lire, c’est «écouter la voix de quelqu’un». C’est joliment dit. Et terriblement pertinent dans ce monde très connecté qui est le nôtre où nous évoluons malheureusement dans des bulles numériques, ne discutant et n’écoutant plus que des gens qui pensent comme nous.

La mise en garde du pape : «N’oublions pas combien il est dangereux de ne plus écouter la voix de l’autre qui nous interpelle».

La littérature nous permet précisément d’échapper à ce danger. Car, comme la lettre le mentionne, la lecture d’un texte littéraire nous met en position de «voir à travers les yeux des autres».

Et voir à travers les yeux des autres nous permet d’être nuancé, mesuré, modéré dans nos prises de position et compréhensif face aux tourments des autres.

«Dans la violence, la faiblesse ou la fragilité des autres, nous avons l’occasion de mieux réfléchir sur la nôtre.» C’est aussi cela ce que nous apporte la littérature. Trop souvent, nous avons tendance à considérer les douleurs, les drames et les difficultés qui sont les nôtres comme étant les pires qui soient. Ce n’est jamais le cas.

En 1853, Hetzel, éditeur de Victor Hugo, perd sa fille. L’écrivain lui adresse ces mots :

«On n’a rien a dire à ces douleurs-là. Je le sais, moi qui les ai éprouvées il y a dix ans et qui, au bout de dix ans, sens au fond de mon cœur la plaie saignante comme le premier jour. Il y a des parties de moi-même qui sont ensevelies dans la tombe de ma fille ; elles ne sont pas mortes, mais elles vivent là. Depuis dix ans, je n’ai pas fermé les yeux, le soir, sans adresser à ma fille ma prière à Dieu.»

Ces mots écrits il y a deux siècles parlent encore aujourd’hui à ceux qui ont perdu des êtres chers.

«En lisant, écrit le pape François, nous découvrons que ce que nous ressentons n’est pas seulement nôtre mais universel, de sorte que même la personne la plus abandonnée ne se sent pas seule.»

Comme je l’ai écrit dans un autre billet, j’ai appris à lire en regardant mon père lire. Depuis son décès, à chaque fois que j’ouvre un nouveau livre, c’est aussi à lui que je pense. Chaque lecture est pour moi une occasion de lui dire : «Regarde, papa. J’essaie de faire comme toi.»

J’aurai bientôt 40 ans. Mais je suis resté le petit garçon qui regarde son papa avec admiration et essaie de faire comme lui.

Dans «Et tu n’es pas revenu» de Marceline Loridan-Ivens, il y a cette belle phrase que l’ancienne déportée de camp de concentration adresse à son père décédé à Birkenau :

«J’étais ta chère petite fille. On l’est encore à quinze ans. On l’est à tous les âges. J’ai eu si peu de temps pour faire provision de toi.»

La littérature est une chose précieuse. Autant que vous le pouvez, apprenez à vos enfants et aux plus jeunes à lire et à aimer la lecture des textes littéraires. Par l’exemple…

2 comments

comments user
Eliot

Très beau texte sur l’importance de la littérature. 😍

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