En février 2017, j’avais lancé un blog comme celui-ci. Mais je n’ai pas tenu sur la durée. Après seize billets, j’ai arrêté. J’ai perdu la flamme. En créant ce nouveau blog, j’ai à cœur de ne pas renouveler cette mésaventure. Ce matin, j’ai relu les textes publiés dans «Joël raconte sa curiosité» (c’était le titre du blog). Et je me suis dit que je devais peut-être republié ces textes. Question de partager avec mes nouveaux lecteurs des textes que je relis toujours avec une certaine émotion. Je ne republierai pas les seize billets. Seulement ceux qui m’ont le plus marqué. Celui-ci est le deuxième que j’avais dans «Joël raconte sa curiosité». En dehors de la photo d’illustration, je n’y apporte aucune modification par rapport à la version initiale.
Texte publié pour la première fois le 17 février 2017.
« Breaking News », « Urgent », « Exclusif », « Alerte », il y en a sûrement d’autres que j’oublie ou que j’ignore. La presse a trouvé ses formules- écrites le plus souvent en rouge vif- pour annoncer une information de dernière minute. Diffuser les informations les plus chaudes est une bonne chose pour le public qui doit savoir. On ne doit pas attendre des heures pour savoir qu’il y a eu une attaque armée ou la démission d’un responsable politique. Mais ce qui est préoccupant actuellement ce que cette recherche de l’information chaude devienne une course. Les médias rivalisent pour avoir la dernière information. L’information doit se consommer « chaud ». Mais justement tout ne se consomme pas chaud dans la vie. Il y a des plats qui se consomment chauds, d’autres non. Et je ne parle pas que de gastronomie.
Cette presse qui a sacralisé l’info de la dernière minute pose question.
Je ne commenterai pas les risques que fait courir cette recherche effrénée pour l’actualité chaude. Les morts annoncées puis démenties de certaines célébrités ont suffisamment été commentées.
«Rendre intelligible le monde»
Plus important que ça me paraît être l’éloignement des journalistes du cœur de leur métier. A mon sens, le journaliste n’est pas le monsieur ou la dame qui fait la course aux événements les plus récents. Il doit être à l’affût de l’actualité, c’est une nécessité. Mais lorsqu’on est à ce point collé à l’actualité chaude comme le font les chaînes d’info en continu, a-t-on encore le temps de penser ce travail qui exige aussi distance et hauteur ? Voilà la question.
« Les journalistes doivent rendre intelligible le monde », nous rappelait Elisabeth Levy (directrice de rédaction de Causeur) dans Polonium sur Paris Première il y a quelques jours.
Rendre les événements qui surviennent au quotidien plus compréhensibles, voilà à quoi doit s’atteler un journaliste. Rapporter les faits, bien sûr. Le plus vite possible, naturellement. Mais le plus important sera toujours de pouvoir expliquer ces faits pour les rendre compréhensibles au plus grand nombre.
Personne n’a l’impression d’accumuler des connaissances ou d’apprendre à force de suivre des informations chaudes. L’annonce de la démission imminente d’un gouvernement ne doit pas mobiliser plus une rédaction que l’explication froide des raisons qui ont conduit à cette démission ou ses conséquences.
Buzz permanent
A force de chercher l’information chaude, nous en sommes venus à devenir des journalistes « récolteurs » de réactions. Faute d’événement qui puisse aboutir à un « Breaking news » (les ministres ne démissionnent pas tous les jours), les journalistes se rabattent à recueillir les réactions des acteurs publics sur les déclarations ou les commentaires d’autres acteurs. Faire commenter un commentaire n’est pas le travail du journaliste.
Et les autres se sont mis à aimer ce jeu indécent. Les femmes et hommes publics passent le clair de leur temps à commenter ce qu’ont dit ou fait d’autres. Alimentant la polémique, perpétuant le buzz. C’est l’époque du buzz permanent. Les informations se succèdent si vite à la Une des médias qu’il faut faire le plus de buzz possibles pour être le plus visible.
Les médias répètent les mêmes choses
Dans ce tourbillon de buzz, d’infos exclusives, comment démêler le vrai du faux. Comment éviter le risque de manipulation. Comment analyser froidement ce que nous devons diffuser. Comment expliquer avec justesse et sens critique ce que racontent les personnes publiques. Et surtout comment éviter que les médias répètent la même chose.
Dans l’émission Paris Première que j’évoquais tantôt, Dominique Wolton s’interrogeait : « Pourquoi les médias parlent de la même chose, au même moment, de la même manière ?». Question légitime que nous devrions tous nous poser. Si la plupart des médias utilisent le gros de leurs moyens pour acquérir les infos chaudes, il est normal que tout le monde (ou presque) diffuse la même chose.
Il est temps que ça change. Un journaliste doit expliquer ce que tout le monde voit. Donner les éléments d’explication, c’est le cœur de son métier. Il est vrai que les réseaux sociaux ont bouleversé le mode de consommation de l’information. Mais faire vivre un média comme on fait vivre un réseau social voilà une idée des plus révoltantes.
Il est temps de revenir aux fondamentaux de notre métier : informer, c’est-à-dire donner du sens au chaos que peut constituer le monde.
La prochaine fois que nous rédigerons un papier, pensons-y !
Informer. J’aimerais vraiment que ceci soit l’objectif des médias comme tu le dis. Excellent !!!
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Merci cher Carlos.
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Malheureusement qu’au Congo les gens n’aiment pas l’excellence.
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